Correspondance

Messages : 35 Date d'inscription : 24/08/2008

[Il y a quelques mois]

Un messager s’attabla à une taverne, scrutant les clients, ce matin en arrivant il s’était renseigné sur les étrangers arrivés en ville et l’un d’eux était celui recherché. On lui avait décrit un homme taciturne, de forte carrure, ancien soldat, cela se voyait physiquement. De souvenir il était plutôt brun, ou châtain, et portait un bracelet avec une perle de bois et un long bâton massif.
Grumpf, semb’pas et’là l’gadjot… pensa l’homme après avoir observé deux fois de suite les personnes présentes. C’est alors qu’il aperçut un recoin sombre dans la salle, et attablé à cet endroit, une ombre imposante. Il se leva, commanda deux choppes au tavernier et s’avança vers l’inconnu, les deux bières à la mains.

« Sieur Gilherm ?! » dit il en posant les breuvages sur la table, tout en vérifiant que l’homme correspondait bien à la description qu’on lui avait faite.
Un grognement fit office de réponse, suivi d'un "Bonjorn", surgit de nulle part, tant ce visage paraissait fermé « B'jour j'suis Javin, ‘fin peu importe en fait, j'suis porteur d’un message à votre intention, d’une belle d’moiselle faut dire, z’en avez d’la chance ! J’l’ai croisée à Tournus, et au fil d’la conversation quand j’lui ai dit qu’j’viendrais dans l’coin elle m’a r’mis ça pour vous , t’nez ! »

Il lui tendit la missive, et bu sa bière tranquillement, attendant une réaction de Gilherm.

Citation :: « Gilherm,
Me voici à Tournus, mais je serais certainement à Dijon pour quelques semaines lorsque vous recevrez cette missive.
Lors de notre rencontre, nous nous étions promis de nous écrire, je fais le premier pas, enfin, il semble, ou nos lettres se seront croisées, qui sait !
J’espère que vous êtes bien arrivé à Toulouse, ou que vous n’en êtes pas loin, vous m’aviez dit vouloir retourner sur la terre de vos ancêtres. Le voyage s’est il bien passé ?
Mes parents et moi sommes toujours sur les routes, à faire de nouvelles rencontres, mais il souhaitent de plus en plus se fixer et ouvrir leur échoppe, ils hésitent encore entre Dijon et Orléans, c’est pour cela que nous seront en Bourgogne quelques semaines avant de nous rendre en bord de Loire, j’appréhende un peu cette nouvelle vie, j’aimais tant voyager et m’enrichir de rencontres comme la votre ou celle de Javin, celui qui doit vous remettre cette lettre. Un homme bon, et plutôt drôle. Il est saltimbanque et se rend de villes en villes animer les places de jeux de balles et de mots. Il m’a appris à jongler ! oh j’avoue n’être pas très douée, mais je m’entraîne, cela me divertit grandement après une journée derrière les étals.
Je vous laisse là, ne voulant point abuser de votre temps, et puis je crains de vous ennuyer avec mes petites histoires peu intéressantes.
Répondez moi si le cœur vous en dit, vous savez où me trouver.

Bien à vous

Ermeline. »

Messages : 83 Date d'inscription : 26/08/2008

Lecture faisant, seul son regard se mit à briller. Gilherm était avare de démonstration. Sans un mot, il replia la lettre, regarda l'homme droit dans les yeux. Avec lenteur il prit son bâton posé à plat sur la table, et claqua un coup sec sur celle ci.

« La même pour cet homme, et un repas s'il vous plait. Il a fait long trajet. »

Voyant que l'homme avait sursauté, Gilherm retira doucement sa main de son baston.

« Comment était elle? »

Bin c'tait une belle d'moiselle, j'vous l'ai dit. Une toute timide, et discrète. J'ai plus parlé affaire 'vec les parents là. Mais, qu'elle a de long cheveux bruns, et des yeux bleus qui parlent pour elle!

Oc, une jolie demoiselle oui. Et qu'on ne s'avise pas d'y toucher.

Bin, si zétiez près d'elle, j'pense qu'on n'os'rait pas!

Bon appétit. Je m'en vais séant en mon bureau. Si vous voulez me voir, demandez le Bailli, aux capitouls.

Javin failli en avaler de travers. Puis Gilherm rejoint son bureau, pour écrire une lettre, qu'il ferait expédier.

Citation :: « Ermeline,

Quel doux bonheur de coucher mes yeux sur votre délicieuse écriture, bénie soit votre mère de vous avoir transmis cet art.

Je suis bien arrivé à Tolosan, là, j'ai pis ma tâche, et j'ai été nommé Capitoul, Bailli pour être plus précis. Ma tache est légère, le seigneur s'il n'est pas encore craint saura le faire rapidement. Je ne gère que rapines lègères et minimes grivèleries.

J'oublie ainsi peu à peu le grondement des batailles, si ce n'est cette odeur et ce goût dans la bouche en pleine nuit.

Ici, la vie est calme et chaude. L'hiver bien entendu prépare son arrivée, mais nous pouvons l'attendre sereinement, peu de bois brulera dans nos cheminées. Vos parents trouveraient à prospérer icelieu, je n'en doute point. Et je prendrais loisir à vous rencontrer.

Vous avez tenu promesse, et trouvé hardiesse pour m'écrire. J'en suis flatté. Trouvez en retour la sympathie de notre rencontre que je n'oublie en rien, en ce petit courrier qui portera en l'azur de votre regard un peu de celui de notre ciel toulousain.

Nous avons ici un sénéchal qui cueille plein de fleur, plus que de brigands, je lui ai pris une violette séchée, que je joint à ce courrier. Puisse t il vous porter un peu de cette senteur de mon pays.

Au revoir gente demoiselle,

Gilherm, maintenant bailli, mais toujours celui que vous avez rencontré.

Messages : 35 Date d'inscription : 24/08/2008

[Dijon, Vers la Cathédrale Sainte Bénigne]

Au milieu du marché, un badaud se détachait de la foule, il semblait pressé et son regard ne s’attachait pas aux étals mais plutôt aux marchands, un peu comme s’il cherchait quelqu’un en particulier. Il était sur le point de renoncer après avoir passé près de la moitié de la matinée dans sa quête, lorsque ses yeux s’arrêtèrent sur une jeune femme de taille moyenne, elle était vêtue d’une chemise blanche de lin épais, d’une jupe marron de la même matière, un châle en laine recouvrait ses épaules et ses cheveux étaient cachés dans un bonnet assorti à sa jupe, cependant, les quelques mèches brunes qui s’en étaient échappées avaient permis à notre badaud d’identifier la jeune femme. Il s’approcha donc timidement d’elle et c’est quand elle le toisa de son regard azuré qu’il eu confirmation de son intuition.

M’zelle Ermeline ?
Euh…oui, que puis je pour vous ? vous voulez un poulet ? de la salade peut être ou un navet ?
Oh non M’zelle ! c’est qu’j’ai un pli pour vous…

Les yeux d’Ermeline s’illuminèrent à l’instant et un sourire se dessina sur son visage.

Père, Mère, je dois m’absenter, je vous rejoindrais pour le déjeuner !

Elle s’approcha de l’homme et l’entraîna dans une taverne un peu plus loin.

[taverne de La Lune d’hiver]

T’in, v’la L’E’m’line ! comment va, ma caille ?! J’te sers un vin chaud ?! pis pour ton ami c’sera quoi ?
Pareil Jean, pareil, et une assiette de potée aussi ! c’est qu’il caille dehors !
Ah ça oui ! pi la rabasse qu’est tombée n’y arrange rien, ma pauv’ t’dois et’ gaugée et frigorifiée !
« gaugée » non, mais frigorifiée, oui ! donne moi les godets que je les amène à la table, te dérange pas.
Non pas, ma caille ! t’vas t’peuter comme j’te connais ! pis j’apporte l’assiette en même temps, arêtes de lôner et va t’asseoir !

Ermeline rejoint donc le messager, à la fois impatiente et pleine d’appréhension, était ce bien la lettre qu’elle attendait ? Jean finit par apporter les vins chaud et le plat pour l’inconnu.

Alors m’sieur ?! D’où vient elle cette lettre ? De Toulouse hein ?! c’est ça ?!!! comment va-t-il ?!
Merci m’zelle pour le boire et le manger, mais c’est qu’j’peux point vous renseigner, j’ai pris l’relais à Clermont, mais l’gars v’nait d’Toulouse,oui, quand à vous donner d’ses nouvelles.. j’doute qu’ce soit d’lui qu’vous en vouliez.

Apres un léger moment de déception, Ermeline continua tout de même la conversation, comparants leurs impressions de voyage. Puis vint le moment de se quitter et de rejoindre ses parents, elle remercia encore une fois l’homme, et s’en fut travailler.
Le soir venu, à l’auberge, elle ouvrit enfin la missive et répondit le cœur battant.

Citation :: Gilherm,
Qu’il est bon d’avoir de vos nouvelles, je vous remercie pour la violette, comme le souvenir de votre accent, elle réchauffe mon cœur. Nous sommes actuellement à Dijon, encore pour quelques jours, la ville est superbe mais le climat peu accueillant, le froid qui y règne vous transperce les habits et vous glace les os ! J’aurais préféré que mes parents veuillent se diriger vers le sud plutôt qu’au Nord, quelle idée ! D’ailleurs, ils ont encore changé d’avis, après un passage à Orléans pour voir des amis, ils ont décidé qu’ils s’installeraient plutôt à Paris… Parait il que la vie y est meilleure… Enfin, je n’ai guère d’autre choix que de les suivre. Alors en attendant je profite du paysage, et pour cela je suis gâtée en ce moment. Les vignes autour de Dijon sont magnifiques, surtout en fin de matinée, quand la brume commence à se lever, que le soleil se reflète dans les cristaux de givre coincés entre deux feuilles ou deux grains de raisin ou laisse apparaître des fils de soie . Et les couleurs ! un vrai festival ! toutes plus chaudes les unes que les autres, de quoi compenser quelque peu la rudesse du climat.
Alors pour me souvenir un peu, je dessine les paysages qui me parlent, qui me font rêver, même si la couleur n’existe que dans ma mémoire. Voilà ma vie en dehors des tracas du marché.
Vous me dites avoir été nommé Bailli, et m’expliquez un peu en quoi cela consiste, mais j’aimerais de plus amples détails, j’ai du mal à saisir votre fonction. En tous cas je vous félicite de vous être intégré si vite dans la communauté ! Mais cela ne m’étonne point au final, votre volonté de servir le prochain est ce qui ressort le plus de vous et vous rend si agréable.
Comme vous avez joint une douce violette à votre courrier, d’ailleurs, elle ne me quittera plus, comme votre pli, je joins au mien une esquisse du vignoble des marcs d’or, je vous laisse deviner pourquoi ce nom. Il est en hauteur de la ville, c’est de là que l’on a la plus belle vue sur Dijon et ses environs.

Bien à vous,

Ermeline, qui espère vous revoir un jour.

Morphée vint l'enlever alors qu'elle scellait le parchemin, le lendemain matin, elle confierait le pli à des connaissances qui partaient en direction de la ville rose.